Le Troisième Sultan Ottoman
Règne : 763 – 791 (1362-1389)
Titres honorifiques et pseudonymes : Ghazi Hounkar (souverain combattant), Khoudawandkar (dévot de Dieu), Emir-i ‘Azam (grand général), Khan, (souverain), Badishah (grand monarque) et Sultan as-Salatine (Sultan des Sultans).
Nom du Père : Orkhan Ghazi.
Nom de la Mère : Nilufer Khatoun.
Lieu et date de naissance : Bursa, 726 (1326).
Âge à l’accession au trône : 36 ans.
Territoires : 500.000 km2.
Cause et date du décès : Martyr sur le champ de bataille du Kosovo, 791 (1389).
Lieu de décès et lieu de sépulture : Kosovo et Bursa !
Héritiers : Ya’qoub Chalabi, Yildirim Bayazid, Savci Bey et Ibrahim Bey.
Héritière : Khatoun Nilufer et Khatoun Malak.
Le Sultan Mourad Awwal, le troisième Sultan Ottoman, administra en tant que gouverneur de Bursa, puis de Sultanoyugu (aujourd’hui Eskisehir) alors qu’il était Sehzade ou héritier du trône (prince héritier). À la mort de son frère Souleyman Bacha, le conquérant de Roumélie, il reprit sa cause et poursuivit les conquêtes en Roumélie. Mourad I évita le débarquement de la papauté et des troupes byzantines dans les golfes de Lapseki et de Saros, et mobilisa les unités pionnières de cavalerie légère, appelées Akincis, tout le long de la voie jusqu’au nord, près d’Istanbul, afin de bloquer la ville lors de la conquête d’Edirne (Andrinople) qui allait devenir la deuxième capitale ottomane après Bursa. Il envoya également l’armée à Edirne sous la direction de Lala Shahin comme une armée pionnière. Lorsque l’armée de Lala Shahin vainquit les forces du souverain byzantin locale d’Edirne dans la vallée de Sazhdere, Sehzade Mourad marcha sur Edirne avec son armée le 28 Joumadah ath-Thani 762 (mai 1361). Comme il l’avait préparé pour de nouvelles conquêtes depuis Edirne, il reçut la triste nouvelle de la mort de son père.
Pendant les premières années de son règne, Mourad Awwal mena une série de combats contre les Karamanides et l’État d’Eretna en Anatolie centrale. Ankara passa sous la domination ottomane à son époque. Du côté de la frontière occidentale, les conquêtes de Mourad Awwal près de Constantinople obligèrent Byzance à organiser une croisade contre les Ottomans. En 767 (1366), une armée de croisés reprit et rendit Gallipoli du côté européen des Dardanelles à Byzance. Le Sultan Mourad Awwal, qui pensa que cela allait mettre en péril la présence ottomane en Roumélie, fit pression sur Byzance pour que l’Empereur lui rende Gallipoli comme condition préalable à tout accord de paix.
Bien que Byzance fût prise en sandwich territorial par les Ottomans, l’Empereur Byzantin choisit de ne pas remettre Gallipoli mais plutôt de former une alliance avec les Serbes afin de débarrasser la Roumélie des Ottomans une fois pour toutes.
Les Serbes, qui avaient une puissante armée composée des forces serbes et d’autres chrétiens locaux, assemblés tout le long du chemin de Thrace à l’Albanie, marcha sur Lala Shahin. Sultan Mourad qui était alors à Bursa, mobilisa ses forces aussitôt qu’il reçut l’appel à l’aide de son commandant Lala Shahin. Les Byzantins qui tenaient Gallipoli refusèrent le passage de l’armée ottomane. Sur un autre théâtre de guerre, l’armée serbe avança jusqu’à Qarman sur le fleuve Merig et commença à défier la ville d’Edirne. Lala Shahin, le protecteur d’Edirne, ne put recevoir l’aide qu’il demanda d’Anatolie. Il savait qu’il serait seul pour lutter contre les Serbes. Il décida donc d’envoyer ses unités pionnières de cavalerie légère face aux Serbes en 766 (1365) selon les sources ottomanes. Les unités pionnières ottomanes commandées par Hajji Ilbayi lancèrent une attaque surprise de nuit et surprirent les soldats serbes dans un état vulnérable. Dans le chaos qui s’ensuivit, les Serbes tombèrent dans la confusion. Certains moururent au combat tandis que d’autres tombèrent dans la rivière Merig (Martisa-Maritza). Le résultat fut une défaite totale. Reconnu dans l’histoire ottomane comme la victoire de Sirb Sindighi (destructions des Serbes), cet événement révéla l’incroyable vérité selon laquelle les forces ottomanes bloquées et sans aide vainquirent l’armée serbe forte de 60000 soldats et alimenta un sentiment d’étonnement et de consternation dans le monde chrétien.
La bataille de Sirb Sindighi 765 (1364)
L’invasion de la Roumélie par les Ottomans rassembla les États Européens contre les Ottomans et conduisit à la préparation d’une puissante armée croisée. Sous l’ordre et les encouragements du pape Urbain V, autour du royaume de Hongrie, qui était l’un des plus grands états d’Europe à l’époque, le royaume de Serbie s’unit avec les royaumes de Bosnie-Herzégovine, de Valachie et des Balkans et réunit une force de 60000 soldats commandée par le roi de Hongrie en personne, Layos V. Les croisés reprirent Plovdiv des Ottomans. Ce mouvement inattendu des armées ennemies prit les Ottomans au dépourvu puisqu’ils ignorèrent tout de cette alliance. Le but de cette croisade était d’expulser les Ottomans hors de Roumélie, de reconquérir les Dardanelles et sauver Istanbul du siège. Les croisés se regroupèrent à Sofia puis descendirent dans la vallée de Méric en été 765 (1364). Ils avaient tellement espoir de leur succès qu’ils ne prirent aucune précaution de sécurité et passèrent leur temps à s’amuser.
Lala Shahin Basha fut informé que tardivement que les croisés marchaient sur Edirne et demanda aussitôt des renforts d’Anatolie. Cependant, le Sultan Mourad, ignorait ce raid et rassembla l’armée en Anatolie. Il ne pouvait pas imaginer que les croisés viendraient si rapidement à Edirne et pensa qu’il serait plus approprié de continuer le siège du château de Biga pour la sécurité de Roumélie et en particulier des Dardanelles. Face à cette situation, Lala Shahin Basha devait défendre Edirne à tout prix. Il trouva donc une solution en la personne du célèbre commandant Hajji Ilbayi, qui était le seigneur de Roumélie.
Mission du Commandant de génie
Alors qu’il était dans cette situation, Lala Shahin Basha vit l’offre de Hajji Ilbayi d’espionner l’ennemi comme une solution pratique et lui confia une unité de 10000 hommes. Ainsi, il pourrait connaitre l’état et le nombre de la force ennemie et ce qu’il pourrait faire. Si les forces ennemies le découvraient, ils les retarderaient en se livrant à des escarmouches pour les distraire afin de reconnaitre leur force. Les forces de Hajji Ilbayi ne faisaient pas partie de l’armée ottomane régulière mais était composée d’unités volontaires de cavaliers appelées Ghazi-Derviche. C’étaient des guerriers performants et puissants qui avaient pris part à toutes les guerres menées jusqu’à ce jour. Lala Shahin Bacha transmettait toutes les nouvelles à Mourad I.
Les cavaliers de Hajji Ilbayi passèrent de l’ouest d’Edirne au nord-ouest de la vallée de Merij. La marche se poursuivit en silence jusqu’à la tombée de la nuit jusqu’à ce qu’ils s’approchèrent de Chirmen. Pendant ce temps, des nouvelles étonnantes commencèrent à venir des habitants expulsées de la région. Les forces ennemies serbe¸ bulgare¸ hongroise, bosniaque et roumaines s’étaient installées dans le camp sans aucune mesure de sécurité. Les troupes alliées se concurrençaient les unes les autres et avaient oublié leurs ennemis. Ils étaient tellement convaincus qu’ils allaient prendre Edirne des Ottomans et expulser les Ottomans de Roumélie, qu’ils oublièrent presque l’existence des Ottomans. Ils étaient heureux et détendus comme s’ils étaient dans un pique-nique et non pas en guerre.
Lorsque les éclaireurs virent cette situation de l’ennemi, ils se rendirent sans délai auprès de leur commandant et l’informèrent. Hajji Ilbayi et les autres commandants examinèrent et évaluèrent rapidement la situation : une rare opportunité et ils avaient appris à tirer parti de telles opportunités dans leurs guerres jusqu’à ce jour. De nombreux châteaux ennemis avaient été conquis par des pièges placés à l’intérieur ou de l’extérieur. Cette fois, l’insensibilité de l’ennemi ne serait pas pardonnée. Hajji Ilbayi rendit son jugement : il compenserait le petit nombre de ses forces en tirant parti du sommeil de l’ennemi et livrerait un raid de nuit d’autant plus qu’ils avaient déjà remporté de nombreuses batailles en faisant de tels raids. Profitant donc de l’obscurité, il décida de détruire l’ennemi dans son sommeil.
Hajji Ilbayi divisa ses forces en quatre groupes. Il nomma à la tête de chaque groupe un commandant sûr tandis qu’il commanderait le quatrième groupe lui-même puis ils se rapprochèrent de l’ennemi et se cachèrent dans une zone boisée jusqu’à la tombée de la nuit. Pour ne pas dévoiler leur présence, aucun homme ne serait autorisé à entrer dans le camp ennemi de l’extérieur et, s’il sortait du camp ennemi, il serait immédiatement capturé et ne serait pas autorisé à retourner dans son camp. Les groupes devaient établir un contact ininterrompu les uns avec les autres et attaquer ensemble. Cette masse ivre, qui n’avait besoin d’aucun secours du fait de son orgueil extrême, buvait sans souci et ne pensait qu’à se divertir et, allait subir bientôt une attaque implacable et la victoire serait réalisée en peu de temps.
Hajji Ilbayi se retrouva avec le groupe numéro trois et le signe de l’attaque sera annoncé dans ce groupe avec un grand nombre d’incendie. Dès que le début de l’attaque, un grand vacarme viendrait de tous les côtés grâce aux tambours et autres accessoires. La cible serait le centre du camp qui sera attaqué de quatre directions, après que l’attaque ait été lancée quelques heures avant l’aube. Ils seraient rapidement exterminés par l’épée sans que l’ennemi nepuisse saisir ses armes. Le signe et le mot de passe serait Allah, Allah. Lorsque la confusion et la panique apparaitrait dans le camp ennemi, chaque groupe devrait se retirer dans la direction d’où il venait puis couvrir systématiquement d’un barrage de flèches l’ennemi égaré. Seule la direction de la rivière Meric du campement où se trouvait l’ennemi serait laissée ouverte tandis que les autres directions seraient complètement fermées et s’il venait dans ces directions, il serait exécuté. Hajji Ilbayi prépara parfaitement ce plan d’opération.