De la prise de Tiflis par Jalal ad-Din
Le 8 du mois de Rabi’ Awwal de l’année 623 de l’Hégire (1226), Jalal ad-Din Ibn Khwarizm Shah conquit la ville géorgienne de Tiflis de la manière suivante.
Nous avons déjà mentionné sous l’année 622 de l’Hégire (1225), les hostilités entre lui et les Géorgiens, leur défaite devant lui et son retour à Tabriz en raison des différences qui éclatèrent là-bas. Quand les affaires de l’Azerbaïdjan se stabilisèrent, il retourna sur les terres géorgiennes au mois de Dzoul Hijjah de cette année. Lorsque l’année 622 de l’Hégire (1225) passa et que la nouvelle année débuta, il envahit leurs terres. Ils rassemblèrent de nouveau des troupes et des hommes ainsi que des peuples qui étaient leurs voisins, les Alains, les Lakz, les Qafjaq et d’autres. Une immense multitude au-delà de tout compte s’assembla et pour cette raison, leur espoir s’éleva. Leurs cœurs leur donnèrent de vains espoirs et Satan leur promis la victoire mais les promesses de Satan ne sont qu’illusions.
Jalal ad-Din les confronta et leur tendit des embuscades à plusieurs endroits. La bataille s’engagea et les Géorgiens s’enfuirent déroutés chacun pour soi et chacun ne se souciant que de sa propre vie. De chaque côté les épées des Musulmans les submergèrent et nul d’entre eux ne survécut excepté un nombre sans importance. Jalal ad-Din ordonna à ses troupes de ne ménager personne et d’achever tous ceux qu’ils trouveraient. Ils poursuivirent donc et tuèrent les fugitifs. Ses partisans lui conseillèrent d’attaquer Tiflis leur capitale mais il dit : « Il ne nous est pas nécessaire de tuer nos hommes sous ses murs. Quand j’aurai anéanti les Géorgiens, je prendrais la ville sans aucun problème. »
Ses troupes continuèrent à les poursuivre et à les rechercher méticuleusement jusqu’à ce qu’ils les aient pratiquement éliminés et ensuite il prit des mesures contre Tiflis et campa à proximité.
Un jour, il sortit avec un détachement de l’armée avec l’intention de jauger la ville et les points d’accès pour le siège et la façon de l’engager. Quand il arriva près de celle-ci, il plaça la plupart des soldats qui étaient avec lui dans une embuscade à plusieurs endroits et ensuite avança plus profondément à la tête d’environ 3 000 cavaliers. Quand les Géorgiens dans la ville les virent, ils devinrent impatients de l’attaquer en raison du petit nombre des soldats qui l’accompagnait, ignorant qu’il y avait d’autres personnes avec lui. Ils firent une sortie et l’engagèrent. Quand il se retira, leur empressement augmenta en raison du petit nombre de ses hommes et pensant qu’il était vaincu, ils le poursuivirent. Ils avancèrent jusqu’au milieu des troupes placés en en embuscade et ces derniers apparurent et les passèrent par l’épée, tuant la plupart d’entre eux. Le reste s’enfuit dans la ville et y entrèrent poursuivis par les Musulmans. Quand ils arrivèrent dans la ville, les Musulmans parmi les habitants lancèrent l’appel à l’ordre de l’Islam et le nom de Jalal ad-Din. Les Géorgiens les cœurs terrifiés jetèrent alors leurs mains et cessèrent de résister à cause de leur petit nombre puisqu’ils avaient perdu des hommes dans les batailles que nous avons mentionnés. Les Musulmans prirent la ville par la force des armes sans accorder de conditions et toutes les Géorgiens furent mis à mort. Ni jeune et ni vieux ne furent épargné, à l’exception de ceux qui acceptèrent l’Islam et prononcèrent les deux phrases de la confession de foi. Ils furent épargnés, circoncis par ordre, puis laissés seuls. Les biens des autres furent pillés et les Musulmans prirent captives les femmes et asservirent les enfants. Cependant, les Musulmans qui y résidaient souffrirent en partie aussi et ils furent tués, pillés ou rencontrèrent d’autres destins.
Tiflis est l’une des villes les plus forts et les mieux défendues, situées sur les deux rives du Koura, un grand fleuve. Cette conquête fut beaucoup célébrée et produit une grande impression dans les terres de l’Islam et parmi les Musulmans après que les Géorgiens les aient dominés et traités comme ils le souhaitaient. Ces derniers pénétraient en Azerbaïdjan quand ils le voulaient et il n’y avait personne pour les arrêter ou défendre les terres contre eux. Ce fut aussi le cas avec Erzurum, à tel point que son souverain se vêtit d’une robe d’honneur du roi des Géorgiens et éleva au-dessus de sa tête une bannière couronnée d’une croix. Son fils se convertit au Christianisme dans l’espoir d’épouser la reine des Géorgiens et par crainte d’eux pour se protéger de leur mal et nous avons déjà raconté son histoire. Ce fuit aussi la même chose avec Darband Shirwan.
Leur menace devint si grande que Roukn ad-Din Ibn Kilij Arsalan, le maître de Konya, d’Aqsaray, de Malatya et d’autres pays musulmans d’Anatolie, rassembla ses armées et invita les autres à se joindre à eux en grand nombre et marcha vers Erzurum qui appartenait à son frère Toughroul Shah Ibn Kilij Arsalan. Les Géorgiens vinrent alors contre lui et le vainquirent ainsi que ses troupes et leurs infligèrent toutes les outrages. Les habitants de Darband Shirwan furent également dans la détresse et la misère à cause d’eux.
D’autre part, les Géorgiens entrèrent dans la ville d’Arjish et prirent Kars et d’autres lieux en Arménie. Ils assiégèrent aussi Khilat et n’était-ce la faveur d’Allah (Gloire à Lui) envers les Musulmans par la capture d’Iwani, le commandant des troupes géorgiennes, ils auraient saisis la ville. Les habitants furent obligés de construire une église pour eux dans la citadelle où la cloche sonna les services. Plus tard, ils quittèrent la ville et partirent. Un compte rendu détaillé de cette incursion a déjà été donnée.
Cette région frontalière fut toujours l’une des plus dangereux pour ceux qui vécurent près d’elle, les Perses avant l’Islam et après eux les Musulmans depuis le début de l’Islam jusqu’à présent. Personne ne l’avait précédemment pénétré si hardiment et entreprit de grandes actions. Les Géorgiens prirent Tiflis en l’an 515 de l’Hégire (1121) alors que le sultan était le Seljouk Mahmoud Ibn Muhammad Ibn Malikshah, un des plus grands sultans qui eut le plus vaste royaume et les plus nombreuses armées mais malgré cela, il fut incapable de la défendre contre eux, en dépit de ses vastes terres qui comprenaient ar-Rayy et ses dépendances, les Hautes Terres, Ispahan, Fars, le Khouzistan, l’Irak, l’Azerbaïdjan, Arran, l’Arménie, Diyar Bakr, al-Jazirah, Mossoul, la Syrie et plus. Son oncle Sultan Sanjar gouvernait le Khorasan et la Transoxiane et la plupart des terres de l’Islam étaient entre leurs mains. Malgré cela, quand il rassembla ses troupes en l’an 519 de l’Hégire (1125) et marcha contre les Géorgiens après qu’ils eurent pris Tiflis, il fut incapable de récupérer la ville. Plus tard, son frère Sultan Mas’oud lui succéda et Ildikiz devint le gouverneur des Hautes Terres, ar-Rayy, Ispahan, l’Azerbaïdjan et Arran. Il reçut les soumissions des Seigneurs de Khilat, de Fars et du Khouzistan et rassembla leurs forces pour affronter les Géorgiens mais le mieux qu’il put faire fut d’échapper à leurs griffes. Puis vint son fils Bahlawan après lui.
Les terres sous les règnes de ces dirigeants furent florissantes de richesses et d’hommes mais qui n’avaient pas l’ambition de remporter une victoire sur ces Géorgiens. Enfin, ce sultan actuel arriva alors que les terres étaient en ruine après avoir été initialement affaiblies par les Géorgiens puis totalement détruites par les Tatars (qu’Allah les maudisse), comme nous l’avons rapporté et pourtant, il accomplit ces grands exploits contre eux. Gloire à Celui qui, quand Il veut une chose, dit : « Sois » et elle est.
Du siège de Jalal ad-Din des villes d’Ani et de Kars
Pendant le mois de Ramadan et comme nous l’avons rapporté, Jalal ad-Din retourna de Kirman à Tiflis d’où il partit pour Ani qui était en possession des Géorgiens et où se trouvait Iwani le commandant des forces géorgiennes avec les notables géorgiens qui étaient restés avec lui. Jalal ad-Din assiégea la ville et envoya un contingent de son armée dans la ville de Kars, également une possession géorgienne. Ces deux places étaient parmi les plus puissantes et les plus imprenables. Il descendit sur les deux et les assiégea, engagea leurs défenseurs et mit en place des trébuchets pour les attaquer. Il procéda à de vigoureux assauts mais les Géorgiens tinrent fermes et exercèrent une extrême prudence et la vigilance en raison de leur crainte qu’il ne les traite comme il avait traité leurs coreligionnaires à Tiflis. Il maintint sa position jusqu’à ce que la moitié de Shawwal fut passé et puis il quitta l’armée assiégeant les deux endroits et retourna à Tiflis.
De Tiflis, il procéda en marche forcée vers le pays d’Abkhazie et le reste de la Géorgie ou il tomba sur les gens y vivant et les tua, pilla et prit des captives. Il ruina et brûla le pays et ses troupes prirent ce qu’il y avait comme butin. Ensuite, il partit et retourna à Tiflis.